Lutte contre la fraude fiscale : les banques se dévoilent

Seulement deux des grandes banques françaises auraient publié la liste de leurs implantations dans les paradis fiscaux et réglementaires, comme l’impose désormais la loi. Il s’agit de Natixis (groupe BPCE) et de BNP Paribas, qui viennent de publier ces données, avec l’ensemble de leurs états financiers, dans leurs « documents de référence pour 2013 ».

BNP Paribas et Natixis constituent donc les bons exemples. Quant aux autres banques, elles ont jusqu’au 30 juin pour publier leur liste. Le Crédit Agricole et la Société Générale ont affirmé qu’ils publieront leur liste au plus tard à cette date limite, comme l’exige la loi. Il faut dire que ces informations sont très attendues des politiques et des régulateurs du secteur financier. En effet, ces derniers entendent vérifier sur pièces le grand repli des paradis fiscaux, auquel se sont engagées les banques depuis 2009, en rayant de leur champ d’action les territoires non coopératifs en matière de lutte contre la fraude fiscale, ou à mauvaise réputation.

Lutte contre la fraude fiscale, les banques se dévoilentDes trous noirs de la finance

C’est à cet effet que l’obligation pour les établissements financiers de faire la transparence sur leurs activités pays par pays, places offshores incluses, avait été intégrée, à l’initiative de la majorité socialiste et des Verts, dans la loi de séparation et de régulation des activités bancaires de juillet 2013. Et ce, en deux temps : en publiant la liste de leurs implantations ainsi que le produit net bancaire, et les effectifs afférents avant le 30 juin 2014, puis en 2015, les bénéfices, impôts et subventions liées.

Rappelons qu’auparavant, l’opacité était totale. L’activité des banques dans ces trous noirs de la finance, où vient se cacher l’argent soustrait au fisc ou issu d’activités criminelles, et se créent des trusts opaques, ne pouvait être sérieusement contrôlée.

Une liste de seulement 20 paradis fiscaux ?

La liste noire française serait moins pertinente, considérée comme trop restrictive par de nombreux parlementaires et experts anticorruption. L’OCDE compterait seulement 20 paradis fiscaux, tandis que Revue Projet en compterait 39.

Pour BNP Paribas, la banque est présente dans sept des vingt juridictions pointées du doigt par l’OCDE, dont le Luxembourg, les Îles Vierges Britanniques, la Suisse, les Emirats arabes unis, le Panama, l’Autriche et la Turquie. Deux de ces implantations (Panama et Îles Vierges Britanniques) sont en train de fermer, selon la banque. Pourtant, dans une enquête à la capitale des Îles Vierges Britanniques, Tortola, on a pu rencontrer des dirigeants d’une entité dénommée BNP Paribas (BVI) Trust Corporation, avec pignon sur rue, qui avaient dit « dépendre de BNP Paribas Jersey et Singapour », et n’avaient pas mention d’un tel processus de liquidation… Dans ces sept territoires non coopératifs jusqu’à ce jour, selon l’OCDE, la banque française a réalisé un chiffre d’affaires de 2,77 milliards d’euros, avec des effectifs importants de 16 044 salariés, en comparaison des 56 585 employés en France. Et si on prend comme référence la liste de la Revue Projet (39 paradis fiscaux), ce chiffre d’affaires monte à 7,9 milliards et 28 500 salariés : 20% du chiffre d’affaires total.